Nouvelle
sensation du jazz vocal dont le nom bruisse sur la scène parisienne,
Lou Tavano publie, à l’orée de la trentaine, son premier album, un opus
qui ne passera pas moins inaperçu que la flamboyante chevelure rousse
qui lui sert parfois d’effigie. « For You ». Ce titre, comme tous les
titres, a plusieurs significations, malgré sa simplicité, malgré son
apparente univocité. Il s’adresse à tous et à un en particulier. A tous,
car le chant de cette jeune artiste, même s’il puise profondément son
inspiration dans un espace intérieur, est d’abord dirigé vers les autres
et la nécessité existentielle de se présenter à un public. A un, car il
est le fruit d’une collaboration déjà longue, avec le pianiste Alexey
Asantcheeff, qui est à ses côtés à la ville comme à la scène. Il est
l’auteur de la plupart des mélodies au répertoire de cet album, pour
lesquelles il s’efforce, avec une minutie passionnée, de tisser les
arrangements qui servent d’écrin au timbre profond et grave de Lou
Tavano.
Ils
se sont rencontrés sur Satin Doll de Duke Ellington. Ce n’est pas la
pantoufle de vair de Cendrillon, que cette poupée de satin, mais pas
loin. Elle, fille de batteur de rock, passée par le piano classique,
avait trouvé dans le chant un « espace pour être soi ». Lui, né de mère
écossaise et de père russe blanc, pianiste en quête de jazz habité par
la mélancolie slave, dès qu’il l’a entendue chanter n’a plus eu qu’une
idée en tête, « que le monde entende cette voix ». Ils avaient la
vingtaine et ne se sont plus quittés, faisant de la musique l’espace
amoureux de leur collaboration artistique, choisissant ensemble le
chemin d’un jazz mâtiné d’influences personnelles qui ont à voir avec la
musique symphonique, le chant lyrique, la folk ou la musique balinaise.
Entourée
d’une équipe de jeunes talents de la capitale avec qui elle a poli ce
répertoire jusque dans ses infimes détails, insufflant la couleur et le
souffle du jazz dans des chansons souvent écrites à quatre mains, Lou
Tavano révèle un talent hors norme et un univers où les mots ont autant
de poids que les notes.
«
J’ai du mal à faire de la musique sans les mots » avoue celle qui
attache une importance toute particulière à ce qu’elle chante, trouvant
dans les paroles des échos à sa propre histoire, sans pour autant les
réduire à leur éventuelle dimension autobiographique. Si les mots sont
toujours seconds quand elle écrit une chanson — « c’est toujours la
musique qui suscite l’histoire » — ils deviennent premiers lorsqu’il
s’agit de l’interpréter. Chaque composition est sous-tendue par un
récit, chaque morceau a son dédicataire, secret ou affiché.
On
ne sera pas surpris d’apprendre qu’en matière d’influences, la jeune
femme revendique des noms qui ne s’ancrent pas tous dans la géographie
du jazz, territoire qui donne sa teinte générale à son art mais avec les
codes duquel elle conserve une distance respectueuse, à l’image de sa
version d’Afro-Blue transposée… à Bali. Aussi, pardelà Nina Simone et
Billie Holiday, « modèles d’interprétation », elle convoque autour
d’elle des personnalités aussi diverses que Joni Mitchell « pour son art
du storytelling », Tracy Chapman pour « un flow bien particulier, une
manière de poser le texte » ou Jacques Brel qui « dégage quelque chose
de très juste ». « Pour moi, la technique vocale n’existe pas, dit celle qui, pourtant, n’en manque pas. Si l’interprétation est juste, alors la voix suit.
C’est
une histoire de sensation, d’adéquation entre ce que l’on ressent et ce
que l’on exprime. » « For You » est comme un ciel de printemps où
alternent percées lumineuses et cieux d’orages. Les éclats joyeux et
insouciants cèdent rapidement la place à une poésie plus dramatique, à
des élans plus mélancoliques. La musique est à l’image de ceux qui la
font : elle peut éclater de rire puis verser une larme dans la même
minute. C’est ce qui fait la force poignante de cet album, dans lequel
l’anglais se mêle au français, au russe et même au balinais. Un album
sans frontière, qui parle du monde et de soi, de l’autre et de nous. Lou
Tavano a ce talent lorsqu’elle chante de nous les rendre sensibles et
attachants.
En concerts :
19/02 - auditorium du Conservatoire, Rosny-sous-bois
21/02 - Terrain Blanc, Quimper
26/02 - Train-Théâtre, Portes-lès-Valence
27/02 - Club Saint-Georges, Lyon
26/03 - Jazz-o-caveau, Caunes-Minervois
27/03 - Domaine de Maleval, Mars
31/03 - RELEASE PARTY, Duc des Lombards, Paris
01/04 - RELEASE PARTY Duc des Lombards, Paris
02/04 - RELEASE PARTY Duc des Lombards, Paris
09/04 - Ecoutille, Courtry
15/04 - Festival Jazz bat la Campagne, Parthenay
07/05 - Festival Printemps de l'Aspre, Perpignan
11/06 - Festival Jazz à Chancelade
01/07 - Respire Jazz Festival, Puyperoux
|